Le renaissance de l’hôpital civil carolo

Le 11 mai 2015 - par Thomas Lecloux

La date du 4 mai marque un tournant dans l’évolution de la ville de Charleroi. Vieux de plus de 50 ans, l’hôpital civil va être démoli pour faire place à un projet mené par le Centre public d’action sociale (CPAS). Ce dernier est devenu propriétaire d’un terrain sur lequel il compte multiplier les projets. Parmi eux, un village pour seniors.

  • Hall d’entrée vide de l’ancien hôpital civil de Charleroi.
    Le hall d’entrée de l’hôpital où se trouvaient à droite, le bureau des admissions, à gauche, une cafétéria et dans le fond, de petits commerces. Photo : Pierre Galhaut
  • Chambres vides où seuls les rideaux restent.
    Les chambres sont désormais laissées à l’abandon. Seuls les rideaux colorés viennent casser le vide de ces grandes pièces. Photo : Pierre Galhaut
  • L’entrée des urgences au sous-sol plongée dans l’obscurité.
    L’entrée des urgences est désormais plongée dans le noir. L’électricité a été coupée pour commencer la déconstruction et cette entrée est située au sous-sol. Photo : Pierre Galhaut
  • Entrée des ambulances et des « patients-minutes ».
    Les patients acheminés par ambulance et les « patients minute » partageaient cette entrée. Photo : Pierre Galhaut
  • Pièce vide et obscure légèrement éclairée par un rayon de lumière.
    Plongées dans le noir et dans un silence palpable, les pièces de l’hôpital dégagent une atmosphère pesante. Photo : Pierre Galhaut
  • Mains d’enfants dessinés sur un mur.
    Certains murs dépeignent des instants de vie partagés au sein de l’édifice. Photo : Pierre Galhaut
  • : Couloir sombre au mur tagué.
    L’hôpital prend des allures de labyrinthe pour les non-initiés. Les ouvriers ont dû taguer des indications aux murs pour s’y repérer. Photo : Pierre Galhaut
  • Escaliers en colimaçon avec rampe rouge.
    Les escaliers sont désormais le seul moyen d’accéder aux étages, les ascenseurs sont définitivement immobilisés. Photo : Pierre Galhaut
  • Couloir étroit et obscur avec traînée au sol.
    La pénombre de certaines parties de l’hôpital donnent la chair de poule, les plus sensibles n’oseraient s’y aventurer seuls. Photo : Pierre Galhaut
  • Salle d’opération abandonnée avec son matériel.
    Cette salle d’opération ne sauvera plus de vies, tout ce matériel sera détruit avec le bâtiment.
  • Boite aux lettres pour déposer les questionnaires de satisfaction des patiens.
    L’hôpital, pourtant apprécié par beaucoup de Carolos, a été délocalisé en périphérie de Charleroi, à Lodelinsart, afin de pouvoir étendre ses services. Photo : Pierre Galhaut
  • Armoires en partie remplies et boite de pilules renversée sur le sol.
    Certaines armoires renferment encore du matériel abandonné avec reste. Photo : Pierre Galhaut
  • Sachet stérile contenant deux seringues non-utilisées.
    Des objets jonchent le sol çà et là comme ces seringues encore sous atmosphère protectrice. Photo : Pierre Galhaut
  • Ecriteau entrée interdite sur une porte entrouverte.
    Plus aucune entrée ne se refuse à ceux qui décident de les franchir, sauf quelques portes verrouillées à jamais. Photo : Pierre Galhaut
  • Ancien laboratoire de l’hôpital complètement vide éclairé par un rayon de lumière.
    Le laboratoire général est situé au sous-sol. Seule une petite fenêtre y apporte quelques rayons de lumière naturelle. Photo : Pierre Galhaut
  • Ancienne salle d’analyse et son dispositif sur rail au plafond.
    Dans ces grandes étendues vides, seuls quelques dispositifs apportent des indices des examens exercés autrefois en ces lieux. Photo : Pierre Galhaut
  • Mot de remerciement écrit au feutre rouge sur un mur carrelé.
    De petits mots, écrits çà et là sur les murs, rappellent la nostalgie qui animait le personnel lorsque celui-ci a quitté définitivement les lieux. Photo : Pierre Galhaut
  • Ecriteau « funérarium » au-dessus de la porte d’entrée d’un bâtiment devant lequel gît une chaise de bureau cassée.
    Derrière le gros bâtiment principal se trouve celui-ci, plus petit. Il contenait notamment le funérarium de l’hôpital. Photo : Pierre Galhaut
  • Papier « Bureau rendez-vous » scotché au mur de la réception dans un couloir désordonné.
    Plus aucun rendez-vous au programme. Toutes les activités ont été délocalisées. Photo : Pierre Galhaut
  • Bureau aux tiroirs ouverts, sur lequel sont abandonnés un téléphone, une perforatrice et quelques objets divers
    Le médecin qui occupait ce bureau a laissé derrière lui certains objets. Photo : Pierre Galhaut
  • Fenêtre vue de face diffusant sa lumière dans une chambre vide.
    La lumière naturelle dessine toutes sortes d’ombres sur le sol et les murs des chambres. Photo : Pierre Galhaut
  • Dossiers oubliés contenant des informations de patients.
    Ces dossiers, manifestement oubliés, contiennent des informations sur certains patients. Photo : Pierre Galhaut
  • Frigo de morgue ouvert et au tiroir à moitié déployé.
    Au sous-sol, la morgue, plongée dans un noir inquiétant, dégage une atmosphère morbide. Photo : Pierre Galhaut
  • : Oreillé déposé au fond d’un tiroir de la morgue
    Au fond d’un tiroir, cet oreiller abandonné ne donne pas spécialement envie de s’y reposer. Photo : Pierre Galhaut
  • Bâtiment principal de l’ancien hôpital civil de Charleroi qui sera bientôt démoli
    Une page de l’histoire du centre de Charleroi se tourne. L’hôpital civil trônant ici depuis des décennies ne fera bientôt plus partie du paysage. Il cèdera sa place à de nouvelles installations principalement dédiées au logement. Photo : Pierre Galhaut

Un symbolique passage de flambeau a eu lieu aux abords de l’ancien hôpital civil de Charleroi. Anciennement géré par l’ISPPC (Intercommunale de santé publique du Pays de Charleroi), le site est désormais propriété du CPAS (Centre publique d’aide sociale) de la ville wallonne. L’organisme social s’est vu offrir le terrain par la ville, qui lui donne pratiquement carte blanche. « Pratiquement » car ce sont bien les autorités communales et surtout son bourgmestre, Paul Magnette, qui ont le dernier mot. « Nous sommes propriétaires du terrain, créons le projet et avançons des idées mais si la Ville n’est pas d’accord, cela ne se fera pas », explique Audrey Noël, responsable communication au CPAS de Charleroi.

Cela n’a cependant pas empêché le CPAS de Charleroi de lancer un projet sur lequel il mise beaucoup. « Quand nous avons appris que l’hôpital serait abandonné, nous avons sauté sur l’occasion, affirme Audrey Noël. Avoir un terrain d’un hectare juste en face de notre bâtiment administratif était une opportunité que nous devions saisir. » Même si certains doutes subsistent, le site devrait a priori être transformé en village pour seniors. On parle d’une capacité d’accueil de 120 lits mais également d’un centre de jour. « C’est un projet qui, on l’espère, aboutira. Nous sommes propriétaires de neuf maisons de repos déjà et cela reste très demandé. Nous envisageons aussi la création de résidences-services, de bureaux et même de logements. Avec un tel espace, les opportunités sont nombreuses. » Cependant, il faudra, encore une fois, l’accord de la Ville. « Sur le plan urbanistique, la Ville a le dernier mot. Une possibilité supplémentaire serait d’y installer une crèche mais nous savons que ce n’est pas à dans les priorités du bourgmestre. Il y a donc très peu de chance que cela se concrétise. »

« Une opportunité à saisir »

Malgré ces nombreuses incertitudes, c’est en grandes pompes que le CPAS a lancé le projet. Cela commencera par la déconstruction de l’hôpital qu’entreprendront les sociétés Castagnetti et Croes et qui prendra plus ou moins un an. « En plus du désamiantage, la phase de déconstruction passera par la récupération d’au moins 90% des matériaux de l’ancien hôpital (câbles, portes, cloisons en bois) », prévient Jean-Marc Delfosse, chef de chantier pour la société de déconstruction Castagnetti. Cela devrait permettre de réduire le coût total de cette première phase estimé à un million d’euros. La deuxième phase, elle, consistera à la démolition du site.

Un manque d’organisation

Le projet mené par le CPAS en vue de démolir l’ancien hôpital civil en plein de cœur de Charleroi devrait ravir de nombreux citoyens. Cependant, certains ne semblent pas totalement convaincus par le travail réalisé par le CPAS. C’est le cas du docteur Michel Daune. Ancien membre de la direction de l’hôpital civil, il a coordonné le déménagement vers le nouvel établissement « Marie Curie » à Lodelinsart. Pour le directeur médical de l’établissement, le CPAS fait preuve d’un manque frappant d’organisation. « C’est un véritable gâchis, regrette-t-il. Le CPAS sait depuis quinze ans qu’il allait avoir ce site et il n’a toujours pas décidé ce qu’il allait en faire officiellement. Il y a eu un manque cruel d’organisation dans cette affaire. C’est d’autant plus dommage car il y a des risques que le terrain reste vide pendant plusieurs années. » D’autant plus que l’avenir du projet est loin d’être certain. On parle d’un coût total avoisinant les 200 millions d’euros. Une somme conséquente qui sera probablement trouvée via un partenariat public-privé. Il faudra cependant attendre pour l’annonce de la réalisation finale du projet. Celle-ci n’est pas attendue avant 2018, date des prochaines élections communales.

Déménagement : quelles conséquences pour le personnel ?

Si le CPAS ne connait toujours pas les infrastructures qui recouvriront le terrain libéré par la démolition de l’hôpital, celui-ci a déjà trouvé l’endroit parfait pour son nouveau bâtiment. Une zone en dehors de la ville a été sélectionnée pour accueillir le nouveau centre hospitalier. Le directeur médical de l’hôpital civil Marie Curie, Michel Daune, estime que le déménagement s’est passé à merveille. Les patients et le matériel ont tous été déplacés en un temps record.

Marilyn Favitz travaille à l’admission de l’hôpital depuis près de 40 ans. Quitter ce bâtiment du centre-ville ne fut pas de tout repos. Les souvenirs restent, la nostalgie apparaît, ses yeux pétillent.

Marilyn a été particulièrement émue par ce déménagement. Le dernier jour, tous les membres des services ont eu la chance d’écrire sur les murs. Découvrez sa réaction lorsque nous lui montrons sa signature ainsi que celles de ses collègues.

Le fameux coeur où Marylin et ses collègues ont signé avant de quitter l'hôpital. Photo : Pierre Galhaut

Le fameux coeur où Marylin et ses collègues ont signé avant de quitter l’hôpital. Photo : Pierre Galhaut

Le docteur Michel Daune a conscience qu’au début, les médecins et infirmiers souffrent du départ d’un hôpital dans lequel ils étaient habitués à vivre. Certains ne s’en remettent pas immédiatement.

Les conséquences peuvent donc aller plus loin qu’un peu de nostalgie. Il existe de réels dangers lors de déménagements, et les hôpitaux ne sont pas les seuls touchés. Les burnouts et l’absentéisme sont des fléaux qui peuvent toucher toutes les entreprises. Si celle-ci souhaite arrêter cela, elle devra trouver des solutions à l’instar du comité de pilotage à l’hôpital civil Marie Curie.

Thomas Lecloux, Pierre Galhaut, Dawid Idrissi et Charlélie Van Driessche

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