À quand remonte la dernière fois que vous avez visionné un court métrage ? Au cinéma ? À la télévision ? Sur internet ? Le format s’y prête pourtant ; à l’époque du numérique, du storytelling, des Snaps ou encore des Vines, les histoires courtes devraient faire un tabac. Pour les jeunes réalisateurs, le court-métrage sert avant tout de porte d’entrée dans le monde du cinéma. « C’est une véritable carte de visite », explique Nicolas Buytaers, critique de cinéma à la RTBF, « un passage obligé. Ça permet au réalisateur de montrer qu’il sait raconter des histoires, qu’il est capable de diriger des équipes, mais également d’attirer l’intérêt des producteurs sur leur création et leur univers. »
Et grâce à sa courte durée (moins d’une heure), il épargne avantageusement le porte-monnaie des cinéastes débutant dans le métier. C’est donc en festival que le genre s’épanouit, pour offrir visibilité et notoriété à son auteur auprès des producteurs et d’un public d’initiés.
« Pas seulement un trailer pour les longs métrages »
Pourtant, on ne peut cantonner le court-métrage au rôle de première partie délaissée d’un futur long-métrage. Moins de temps signifie plus de densité, de possibilités et des techniques de narration plus variées. « Tu peux te permettre beaucoup plus de choses que dans un long », se réjouit Ely Dagher, membre du jury courts métrages. L’année dernière, sa première œuvre Waves ’98 a remporté la Palme d’or à Cannes et le Bayard au FIFF pour le meilleur court métrage. « Les gens ont plus de patience donc tu peux expérimenter. Le plus important, c’est que les gens soient emportés par ce que le réalisateur veut raconter et qu’il soit un film à part entière. Pour moi, le court a une vraie importance en tant qu’objet, pour ce qu’il est, et pas seulement parce qu’il permet l’accès au long. » D’ailleurs les exigences du format sont différentes puisque si l’histoire, condensée, gagne en intensité et en dynamisme, les personnages doivent être écrits avec d’autant plus de soin pour être suffisamment consistants.
Petit film, petit public
Court et riche n’est dès lors plus seulement la devise de Nicolas Sarkozy, et il conviendrait d’apprécier enfin le film court à sa juste valeur. « Avant, dans les années 80 ou 90, on passait un court métrage avant le film », raconte Nicolas Buytaers. Aujourd’hui, en dehors des soirées spéciales dans les festivals, on ne le trouve que très peu. Même les journalistes sont parfois condamnés à les regarder chez eux, sur internet ou en DVD, quand ils doivent en faire la critique. Et c’est tout le paradoxe du genre. On lui consacre des festivals, des jurys, des prix et il sert de tremplin aux jeunes artistes, mais le grand public n’y a pas facilement accès. « Pour moi, il faut qu’ils soient diffusés en télé, ou sur le web. C’est le retour au petit écran qui peut sauver le genre et amener les gens à se dire – Ah c’est chouette, le court métrage, finalement- et les amener en festival », conclut Nicolas Buytaers.