Espoirs d’une jeunesse sur siège éjectable
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Espoirs d’une jeunesse sur siège éjectable

Espoirs d’une jeunesse sur siège éjectable

par Nicolas Decaestecker, Dickson Kalunga, Malaïka Loozen et Yassine Mazouni
21 octobre 2016

Chaque année, environ 1 500 mineurs étrangers non accompagnés (Mena) migrent vers le Royaume-Uni. Protégés jusqu’à leurs 18 ans, ils se retrouvent ensuite menacés d’expulsion. Malgré l’incertitude, ils doivent tenter de se construire un avenir, une vie sociale et de s’intégrer à la société britannique.

Dans le quartier de West-Ham, au nord de Londres, certains jeunes dont l’avenir s’écrit en pointillés jouissent d’une structure d’accueil : l’association Dost. Depuis quinze ans, l’organisme tente d’améliorer le quotidien des jeunes migrants, plus particulièrement leur bien-être. Des animations, des activités sportives et des moments de retrouvailles sont ainsi organisés pour tisser un nouveau réseau social. Les bénévoles essaient aussi de préparer psychologiquement les migrants à devoir, peut-être, retourner dans leur pays d’origine.

  • Dost
    Imran, jeune réfugié érythréen, apprend à dessiner un sapin de Noël pour s’imprégner des coutumes européennes, au sein de l'association Dost.
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Ça m’a perturbé et blessé lorsqu’on m’a annoncé que je devais partir, parce que j’avais l’impression d’être un poids ou une sorte de criminel pour la société anglaise. Lionel

Lionel, 23 ans, est un des jeunes qui s’est retrouvé dans cette situation. D’origine congolaise, il est arrivé en Angleterre en 2008. Comme les autres mineurs, il a eu l’autorisation de rester sur le territoire jusqu’à sa majorité, mais par la suite, son statut a été remis en question.

« Un jour, j’ai reçu une lettre m’ordonnant de quitter le territoire. Sur le coup, j’étais sous le choc », raconte-t-il. « Ça m’a perturbé et blessé lorsque l’on m’a annoncé que je devais partir, parce que j’avais l’impression d’être un poids ou une sorte de criminel pour la société anglaise. » Avec le temps, ce sentiment s’est estompé. Lionel préfère relativiser : « Après réflexion, je me suis dit que mon pays natal me manquait et que ce n’était pas plus mal comme ça. Je trouve l’atmosphère urbaine londonienne assez grise et monotone, tandis que l’aspect plus naturel congolais me manquait. »

Parrainage « one-to-one »

Malte est éducateur dans plusieurs associations qui s’occupent de jeunes réfugiés, dont Dost. Pour lui, les activités proposées sont indispensables à l’épanouissement des jeunes.


« Ils ne choisissent pas où vivre, l’association s’en occupe. Ils ne choisissent pas leur école, l’association s’en occupe. Ils ne savent pas combien de temps ils resteront dans le pays. La seule chose qu’ils peuvent décider eux-mêmes, c’est ce qu’ils font de leur temps libre », explique Malte.

Dost

Une des composantes de ces associations est le parrainage. Un volontaire anglais s’occupe personnellement d’un jeune réfugié. Ensemble, ils font du sport, sortent au cinéma, s’adonnent à des activités culturelles. Cette relation privilégiée permet au jeune de se confier plus facilement que devant un psychologue. Le parrain est là pour le soutenir moralement dans toutes les situations, y compris lors du renvoi du tout juste majeur vers son pays d’origine.

Irène, citoyenne britannique depuis 2005.

Irène : « Je ne pense pas que l’Angleterre soit un paradis »

« On ne peut pas considérer Londres comme un Eldorado.” Irène, 35 ans, est arrivée dans la capitale britannique en 2003, après avoir quitté la République démocratique du Congo (RDC). Citoyenne britannique depuis 2005, elle constate “qu’il était déjà difficile d’arriver ici à l’époque, mais que ça l’est encore plus aujourd’hui”. Pour elle, les politiques mises en place et la crise de l’accueil des migrants n’ont fait qu’empirer la chose.


« Je ne pense pas que l’Angleterre soit un paradis mais je pense que c’est la même chose pour plusieurs pays européens », déclare Irène. « La vie n’est pas facile en Angleterre, la vie est plus chère en Angleterre. Quand tu es à l’extérieur, tu penses que les choses sont plus faciles mais ce n’est pas la réalité. Tu dois travailler dur et recevoir ce qui t’est dû. »

Déterminés à revenir

Les décisions de renvoi se font au cas par cas, en fonction du pays d’origine, du profil et du comportement du jeune pendant son séjour. Phong, Vietnamien, a commis de petits délits liés au trafic de drogue quand il était sur le territoire. Il s’est fait interpeller par la police et a été placé en maison de redressement. La décision de le renvoyer a ensuite été prise.

Malgré le verdict il y a près d’un an, Phong est toujours sur le sol britannique. Le système judiciaire, les procédures d’appel et de recours prennent du temps. Les associations assurent aussi la protection des jeunes vis-à-vis du trafic. Ils sont plus vulnérables car ils n’ont pas d’encadrement familial à leur disposition.

Le gouvernement Cameron a cherché à instaurer une atmosphère hostile à l’accueil de cette vague de jeunes, mais malgré les obstacles rencontrés, ces derniers seront toujours déterminés à revenir. Selon la Children’s Society, entre 10.000 et 15.000 d’entre eux rejoindront le Royaume-Uni chaque année.

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