Dimitrie, peintre grec connu sous le pseudonyme “The Krah” (cf. photo d’accueil), explique lors du vernissage de sa dernière exposition que l’art peut également être une échappatoire économique. « Bien sûr, il y a d’abord la qualité de l’œuvre qui importe. Mais cela dépend aussi de la situation de l’artiste. S’il vient d’une zone dévastée par exemple, il aura de meilleures chances d’exposer. Il aura une très bonne publicité s’il vient d’une région très instable. »
Cet ancien artiste de rue avance le double intérêt de ce processus : “Si j’avais une galerie d’art, j’aurais tendance à exposer des œuvres d’artistes syriens ou irakiens en expliquant ce qui se déroule là-bas. Ce n’est pas que pour la publicité, c’est aussi pour transposer ce qui s’y passe. »
Globe Aroma, la galerie qui accueille l’art des réfugiés
Avec l’arrivée massive de migrants en Europe et en Belgique, les initiatives d’intégration prolifèrent. Au cœur du quartier Dansaert, à Bruxelles, l’ASBL Globe Aroma œuvre depuis 13 ans à la promotion de la culture du monde. En entrant dans l’atelier de cette ancienne industrie, on découvre un univers attachant et déroutant. On y retrouve une salle de musique, une cuisine, une salle d’exposition et cette grande pièce ombragée où les œuvres s’agglutinent avec le temps.

Les artistes mis en valeur sont pour la plupart réfugiés ou demandeurs d’asile. Ils travaillent en cohésion, dans un univers de création artistique permanent. Tous possèdent des accords pour rester en Belgique. La plupart étaient artistes dans leurs pays ou avaient suivi des cours dans une académie. Ils (re)trouvent donc un plaisir inconditionnel à accomplir leur art, encadrés par une organisation.
La mixité du lieu étonne, les artistes représentent des dizaines de pays et parlent de nombreuses langues. Une véritable richesse pour cet endroit qui cultive la mixité du monde.
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L’art, ce ciment culturel qui nous unit
Avant, Dimitrie (« The Krah ») taguait partout en Europe. Aujourd’hui, il s’est installé en Angleterre et s’épanouit visuellement à chaque fois qu’il se balade dans les ruelles londoniennes, accompagné de ses deux chiennes Ugo et Lili. « J’ai arrêté d’utiliser les trains et les murs pour exposer mon art lorsque j’ai su que Londres regorgeait de salles d’expositions. Voir des œuvres de tous les horizons dans le même lieu, c’est ce qui fait de Londres son génie. »
Pensez à ce que mangent les Anglais par exemple. Ici, vous pouvez manger indien avec du curry en provenance directe de Bombay et déguster des glaces italiennes comme si vous y étiez. C’est exactement la même chose avec l’art. Il n’y a que le meilleur ici, le meilleur du multiculturel. The Krah
À un jet de pierre de Big Ben, le long de la Tamise, Dimitrie sourit en contemplant l’une de ses œuvres, avant de conclure : « Vous savez, l’art façonne nos sociétés, les interactions. L’art nous construit tous autant que nous sommes. C’est le ciment qui nous unit. Ne l’oubliez pas. Les valises des migrants sont peut-être pauvres à première vue, mais à y regarder de plus près, leurs bagages culturels sont d’une richesse insoupçonnée.”