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07
Avr
2015

La médiatisation des conventions ZEP/Sciences Po : conférence donnée par Nazli Nozarian.

La médiatisation des conventions ZEP/Sciences Po : conférence donnée par Nazli Nozarian.

07 Avr
2015

Une mesure sociale discriminante?

Nazli Nozarian est docteure en sciences politiques. Sa thèse portait sur la «démocratisation» des grandes écoles et la sociodicée des élites. La chercheuse s’est surtout penchée sur le cas des conventions ZEP/Sciences Po Paris, qui ont fait couler beaucoup d’encre dans la presse.

Pour rappel, au sein des Zones d’Education Prioritaires (ZEP), les établissements scolaires reçoivent des aides publiques pour mener à bien leur mission d’éducation. Ces moyens supplémentaires visent à lutter contre les inégalités sociales et territoriales, à rendre l’enseignement supérieur accessible à tous.

Sciences Po Paris a été la première grande école à ouvrir ses portes aux étudiants provenant d’établissements situés en ZEP mais d’autres écoles l’ont imité après son succès médiatique.

Ce succès signifie-t-il que les objectifs sociaux de la mesure sont atteints ?

En vertu de la convention d’éducation prioritaire, en principe, l’accès aux grandes écoles est ouvert à tous sans exceptions. Dans la pratique, une étude réalisée en 2002 par Centre de recherches politiques de Science po ( CEVIPOF), montre que les pronvinciaux et jeunes issus de classes sociales défavorisées ont moins de chance de réussir l’examen d’entrée que les parisiens et classes sociale supérieures.

Finalement la majorité des étudiants réussissant l’examen sont ceux qui ont pu préalablement se préparer, moyennant un coût exorbitant. Pas tout à fait la fin des inégalités.

Pourtant, le traitement médiatique des étudiants bénéficiant des conventions ZEP nous transmet une autre représentation de ces jeunes. La figure médiatique de l’étudiant ZEP, c’est celle, homogène, d’un jeune forcément pauvre, issu de l’immigration et vivant dans un quartier défavorisé.

Le bon « pauvre » face au mauvais

Les médias mettent ce misérabilisme social et familial en contraste avec le caractère volontaire et méritant des jeunes bénéficiaires. Ils attribuent le plus souvent leur succès à des facteurs psychologiques et attitudes personnelles. Ce faisant, les médias font peser sur ces jeunes la responsabilité de lutter contre des inégalités dont ils sont les premières victimes. Ils créent une frontière entre les « bons pauvres méritants » et les « mauvais pauvres ».

Nazli Nozarian explique cette homogénéisation médiatique par le fait que beaucoup d’étudiants qui rejettent ce cadrage médiatique, refusent les sollicitations des journalistes. Ceux qui jouent le jeu sont dès lors ceux qui acceptent de rejoindre ces stéréotypes et de les renforcer.

Dans son intervention, la chercheuse interroge finalement une production médiatique intensive qui alimente des portraits caricaturaux et renforce le fossé symbolique entre riches et pauvres.

 
Nous avons voulu en savoir plus en 3 questions :

Ne pensez-vous pas que l’individualisation de la question scolaire que vous évoquiez auparavant, est plus fondamentalement liée à une individualisation et une dépolitisation des questions sociales en France ?

Après la Success Story de Sciences po Paris, les grandes écoles ont-elles suivi le mouvement ?


Vous avez évoqué la nécessité de mener une réforme plus fondamentale de l’enseignement supérieur en France. Les mesures de « discrimination positive » telles que les conventions ZEP ont-elles un avenir ?

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