29
Nov
2015

"Belge Une Fois" : le magasin Made In Belgium créé par un couple d'artistes. Rencontre.

"Belge Une Fois" : le magasin Made In Belgium créé par un couple d'artistes. Rencontre.

29 Nov
2015

“Belge une fois” : entre belgitude et créations artistiques

Le magasin « Belge une fois » a ouvert ses portes en plein cœur de Bruxelles. L’initiative est partie de Natacha, 26 ans, graphiste de formation, et de l’homme qui partage sa vie, Arthur. Lui est à l’origine constructeur de décors pour la publicité et le cinéma. Elle, véritable patriote, a fait des belgicismes sa marque de fabrique. Une aventure commencée sur les marchés qui débouche finalement sur l’ouverture de leur magasin « Belge une fois » qui rassemble un tas de créations 100% locales. Interview croisée.

Comment le projet a-t-il réellement débuté ?

Natacha : Je trouvais que les Belges n’étaient pas suffisamment fiers de leur pays. Les gens ne se rendent pas compte de l’humour, de l’autodérision qui se cache derrière chaque Belge. Le fait que le Belge puisse se foutre de sa propre tronche m’a donné envie de trouver une manière de le représenter. Et je me suis dit que les belgicismes étaient le meilleur moyen pour exprimer cet humour propre au pays. Que ce soit mes parents ou mes grands-parents, ces belgicismes font partie de notre culture. Ça a démarré avec plusieurs cartes postales que je vendais sur les marchés, pour finalement se concrétiser avec l’ouverture de notre magasin.

Arthur : Le véritable déclencheur, c’est finalement ce buzz sur Facebook. Ce n’est même pas nous ! C’est une cliente qui a pris en photo notre carte postale remplie de belgicismes. Elle l’a publiée elle-même sur les réseaux sociaux et, par la suite, il y a eu plus de 5.000 partages. Même si cette photo a fait le tour des réseaux sociaux sans qu’on puisse savoir que c’était une de nos créations, on se rendait quand même compte que ça plaisait au grand public.

  • Le magasin offre également un espace de restauration et de détente
  • "Waar is de feestje ?", un slogan bien connu des bruxellois
  • Natacha, propriétaire des lieux
  • Oeuvre de Jean-Bon, illustratrice décalée belge
  • Petit cours de belgitude au détour de la boutique "Belge une fois"
  • Plus de 60 créateurs sont exposés dans le magasin
  • Gobo Lighting, des éclairages surprenants et modifiables

Comment expliquer cette vague de belgitude ?

A. : Les célébrités ont joué un rôle prédominant ! Des artistes comme Stromae ou Selah Sue se font connaître en dehors de la Belgique et amènent un sentiment de fierté pour notre pays. Il y a bien sûr l’influence de l’équipe nationale belge de football, avec cet engouement durant la Coupe du monde 2014. Et puis le coté “nostalgique” avec le retour des mots et des expressions qui étaient utilisés par nos aînés.

N. : La Belgique est aussi reconnue dans le monde de la mode, du design ou même de l’architecture. Beaucoup de gens parlent de notre côté cliché : “Je suis belge, j’adore les frites, j’adore la bière”. Je pense qu’on est un peu tous des clichés vivants et c’est une fierté pour nous ! Je pense que les Français ont mis du temps à se rendre compte que nous sommes à fond dans l’autodérision et ce n’est pas de la bêtise pure et simple.

A. : Avec nos produits « Belge une fois », on touche un public large qui va de 15 à 75 ans intéressés par la belgitude et les belgicismes. Avec ce magasin, on peut ne pas se limiter à la belgitude en tant que telle, mais bien à la culture belge !

N. : Je pense que les gens commencent à un petit peu plus à réfléchir à leur consommation, que ça soit dans le textile ou dans la nourriture. En ce qui concerne nos prix, ils sont tout à fait accessibles. Vous n’allez pas payer plus cher votre pull chez nous qu’un pull “Made in China” ! Donc pourquoi ne pas acheter b elge ? Je trouve important de connaître l’origine des produits que je vends. Et en achetant chez nous, vous encouragez les initiatives de jeunes artistes belges qui nourrissent le désir de vivre de leur propre activité.

Quels sont les deux artistes qui vous ont marqués ?

Premièrement, Gobo lighting : c’est le plus impressionnant par rapport à son parcours ! On l’a connu au tout début, sur de petits marchés, et c’est devenu par la suite un véritable ami. Il crée des luminaires avec des boules. Quand on les touche, cela change complètement l’aspect de la lampe. Je suis admirative de la démarche et je ne comprends toujours pas comment il a réussi à imaginer ça dans sa tête !

Ensuite, il y Jean-Bon. C’est une illustratrice qui fait des stickers totalement décalés en utilisant l’humour noir, l’humour crado et sexuel. Et elle le fait tellement sans complexe qu’on dirait un mec !

Comment se sont passées les rencontres avec ces artisans et ces producteurs belges ?

N. : Ça va vraiment dans les deux sens. Maintenant que nous avons ce magasin, c’est beaucoup plus simple. Les gens un minimum curieux s’aventurent dans le magasin et nous parle de ce qu’ils font ! Puis à côté de ça, il y a les artistes qu’on rencontre sur des marchés ou sur des événements. Si on a un mauvais feeling avec la personne, on ne travaillera pas avec elle. Notre but est d’avoir une certaine proximité et une complicité avec ces artistes.

A. : La plupart des créateurs que nous exposons sont très jeunes ; ils viennent de sortir de leurs études. On aime cette fraîcheur et ce dynamisme. Ils ont un certain côté avant-gardiste. On a également le désir d’exposer plus de créateurs flamands.

Quels sont vos projets pour l’avenir?

N. : On veut organiser plein de concerts, des workshops, des dégustations dans notre magasin. On a aussi envie de faire des vidéos sur Youtube et continuer à développer notre blog. On ne pouvait pas prévoir le succès qu’allait rencontrer « Belge une fois ». On a eu un très bon accueil de la part des médias. On est des fonceurs. On a une idée, on le fait ! On ne réfléchit pas trop, il faut battre le fer pendant qu’il est encore chaud !

La belgitude, un délicieux mélange de surréalisme et de fricadelle

C’est lors des grandes réformes de l’État dans les années 1970 et 1980 que le terme est apparu. Le pays devient fédéral et un manque de culture belge se fait ressentir. À travers les différentes langues et communautés, il est parfois dur de se sentir unis. Les citoyens se questionnent sur ce qui leur est propre. La belgitude répond à cette crise identitaire. L’autodérision étant très typique des Belges, elle s’imposera, de même que le sens du compromis ou le surréalisme.

Le mot « belgitude » est entré au dictionnaire Robert en 2012 avec comme définition : « Ensemble des traits culturels propres à la Belgique ; sentiment d’appartenance à la Belgique en tant qu’entité culturelle spécifique. »

Alex Vizorek, humoriste et chroniqueur belge, décrit, dans une chanson en duo avec Oldelaf créée pour la Première, sa vision du concept : « La belgitude, c’est quand tu vis bien mieux sans gouvernement. C’est quand les Diables rouges sont plus drôles que Pirette. C’est quand t’écoutes parler longtemps le prince Philippe. C’est quand t’hésites entre poulycroc et cervelas. »

– Pour Pierre Krol, dessinateur, c’est « ce qui nous est tellement propre que le plus grand des dictionnaires français est incapable de l’expliquer avec intelligence ».

Elio Di Rupo, ancien premier ministre donne sa définition : « C’est être sérieux, sans jamais se prendre au sérieux. C’est accepter que l’on puisse rire de nous. »

Benoit Poelvoorde est lui plus mitigé lors d’une interview pour Le Soir : « Ça ne veut rien dire pour moi. Je suis certes attaché à la Belgique, mais pas comme une forme de corporatisme. Si on me demande si je suis Namurois ou Belge, je répondrai Belge, mais c’est tout. »

– Pour Natacha, la belgitude s’illustre en une phrase : « Non peut être » qui veut dire « Oui bien sûr » ; cela résume parfaitement la complexité et la simplicité du Belge.

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