06
Nov
2014

Les coupes budgétaires annoncées par le gouvernement Michel menacent le secteur culturel bruxellois.

Les coupes budgétaires annoncées par le gouvernement Michel menacent le secteur culturel bruxellois.

06 Nov
2014

La culture bruxelloise en danger

Le jeudi 23 octobre, on apprenait que le secteur de la culture à Bruxelles sera mis à mal par le nouveau Gouvernement dit suédois. Jusqu’à 30% de subsides vont être économisés d’ici 2019. Ces coupes budgétaires représentent-elles un réel danger pour le secteur de la culture bruxelloise ? Peut-on parler de « favoritisme » communautaire ? Qu’en est-il du projet d’achat du bâtiment Citroën par la Région bruxelloise pour y installer un musée d’art moderne et contemporain ?

Des économies drastiques

Le gouvernement Michel 1er coupera dans le budget de toutes les institutions culturelles fédérales. La Monnaie, le Palais des Beaux-Arts, l’Orchestre National, la Bibliothèque royale de Belgique, le musée Magritte, le musée du Cinquantenaire, le musée des Sciences Naturelles, le musée de l’Afrique centrale, entre autres, seront touchés.  La Monnaie devra fournir un effort supplémentaire. En plus des économies sur les frais de personnel (12%), de fonctionnement (20%) et d’investissement (30%), elle est menacée de fusionner avec l’Orchestre national. Quant à la Bibliothèque royale de Belgique (BRB), cela fait déjà trois ans qu’elle cherche des alternatives. « On comprend les efforts qu’il faut faire, on n’est pas les seuls, tout le monde est touché. Mais une bibliothèque qui ne peut plus acheter de livres, c’est ridicule! », ironise Sara Lammens, directrice des services d’appui à la BRB. Autrement dit, même avec beaucoup de créativité, la Bibliothèque royale, véritable institution belge, risque de s’assécher. Dans une lettre ouverte à la classe politique, 250 organisations bruxelloises se sont mobilisées pour dénoncer les menaces que ces coupes budgétaires représentent réellement pour le secteur culturel.

Un enjeu communautaire

Dans la presse, on lit que seul le Musée Royal de l’Afrique à Tervuren sera privilégié. La raison: il se trouve en Flandres. Un subside de 547.000€ lui serait accordé afin de construire un nouveau pavillon d’accueil. Et cela, malgré les mesures d’économie drastiques annoncées. Peut-on parler ici d’une faveur politique liée à sa localisation géographique ? « Nous allons devoir faire autant d’économies que les autres. C’est-à-dire une restriction de 30% sur cinq ans », rétorque Marie-Pascale Le Grelle du pôle communication du musée de Tervuren.  Le subside au centre de la polémique est une subvention allouée par le programme « Impuls » de Toerisme Vlaanderen. Le programme « Toerisme voor Allen », initiative du ministre Ben Weyts (NV-A) propose une bourse aux musées qui en font la demande afin de rendre leur établissement accessible aux personnes à mobilité réduite, aux aveugles et aux malvoyants.

« Cette fois-ci, et pour la première fois, les Etablissements fédéraux étaient invités à participer au programme, y compris ceux de Bruxelles. Seuls le Musée royal d’Afrique centrale, BOZAR et le Conseil bruxellois des Musées ont soumis un dossier. Ce n’est donc pas parce que nous sommes en Flandres que nous avons reçu ce subside », se défend Marie-Pascale Le Grelle du musée d’Afrique. Le Conseil bruxellois des Musées a également confirmé avoir reçu des subsides, le Musée de Tervuren n’est donc pas le seul. En tout, deux millions d’euros seront consacrés à ce programme, selon le site web de la NV-A.

Un musée au canal

Le bâtiment Citroën dans le quartier du canal fera peut-être place à un musée d'art moderne et contemporain. Photo : Eden Krsmanovich

Le bâtiment Citroën dans le quartier du canal fera peut-être place à un musée d’art moderne et contemporain. Photo : Eden Krsmanovic

Le musée d’art contemporain dans le quartier du canal verra-t-il le jour ? La région bruxelloise le souhaite, mais dans le camp de la NV-A, des voix s’élèvent. Selon Lore Vandoorne, conseillère en communication de Yamilda Idrissi, la région bruxelloise est dans un processus de rachat du bâtiment. « L’envie première du gouvernement bruxellois était d’utiliser la collection fédérale d’art contemporain », affirme-t-elle. Mais récemment, deux parlementaires NV-A, Cieltje Van Achter et Cathy Coudyser, se sont opposées à ce projet. Selon les élues NV-A, la collection fédérale est « une et indivisible ». Le monde de la culture n’a pas tardé à entrer en ébullition et certains médias affirment que le projet du musée n’aura pas lieu. « Mais rien n’est encore décidé. Ce ne sont que des parlementaires et pas des ministres qui se sont opposés. La ministre Elke Sleurs, elle aussi NV-A, n’a encore rien confirmé ni contredit », rassure Lore Vandoorne.

Yamilda Idrissi (sp.a), députée bruxelloise et initiatrice du projet « Museum aan het Kanaal/Musée au Canal » (MAK), a démarré une campagne rassemblant cent personnalités belges (Edouard Vermeulen, Michaël Roskam, Stromae…). Son message : le quartier du canal est le symbole du clivage de Bruxelles Nord et Sud. Un musée d’art contemporain re-boostera sans aucun doute cette partie de Bruxelles « délaissée ».

Yamilda Idrissi écrit sur son site : «le musée d’art moderne et contemporain situé dans la zone bruxelloise du canal est pour moi une métaphore pour les ambitions de notre ville. Il est le symbole de la possibilité des politiciens fédéraux, flamands et bruxellois d’agir de concert, de se surpasser et de permettre des changements ». De son côté, le ministre-président bruxellois, Rudi Vervoort, avoue que le problème sera plutôt la collection du musée si la collection fédérale leur est refusée. A cette question, Yamilda Idrissi propose que le nouveau musée combine la collection d’art fédérale avec trois autres collections d’art existantes à Bruxelles : les collections des pouvoirs publics, comme par exemple celles de la Banque Nationale ou de la SNCB ; les collections des entreprises, comme par exemple celles de la banque Belfius ou la banque ING ; et, enfin, les collections privées. « Maintenant, tout est question de collaboration avec la NV-A », conclut Lore Vandoorne.

L’annonce de ces coupes budgétaires fait l’effet d’une véritable tempête dans le secteur de la culture à Bruxelles. Certaines institutions pourraient ne pas s’en remettre. D’autres, cherchent déjà des alternatives. Il semble que la NV-A ne fasse pas réellement de « favoritisme communautaire » car le Musée de l’Afrique Centrale n’est pas la seule institution culturelle fédérale à avoir reçu des subsides de la part du programme « Toerisme Vlaanderen », le Conseil bruxellois des Musées aussi. Par contre il se peut que la NV-A ne soit effectivement pas « pour » une Belgique unie par la culture, coupant les budgets de ce secteur dès qu’elle le peut. Le musée d’art moderne et contemporain qui doit prendre place dans le bâtiment Citroën le long du Canal est un projet qui remporte une large adhésion et on peut espérer que celui-ci aboutisse. Par contre le problème des collections n’est pas encore résolu et rencontrera sûrement de multiples obstacles.

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