27
Avr
2016

ICI MOSCOU. Les militants du collectif « Stop a douchebag » arpentent les rues pour décourager les incivilités automobiles.

Des stickers géants sur les pare-brises... une façon originale de faire respecter le code de la route moscovite.

ICI MOSCOU. Les militants du collectif « Stop a douchebag » arpentent les rues pour décourager les incivilités automobiles.

27 Avr
2016

Les justiciers du code de la route, caméra au poing

Autocollants grand format et caméra à la main, Mohamed et Ilia sont prêts. Le collectif se donne rendez-vous à 14h à Loubianka, un quartier chic en plein centre de Moscou. Igor, un peu en retard, les rejoint enfin pour partir à l’assaut des voitures mal garées.

Le soleil brille et la circulation, dense comme à son habitude, étouffe le centre-ville de Moscou. Comme très souvent, le collectif Stop a Douchebag, en français « arrête un connard », s’apprête à se lancer dans ce flux de circulation incessant. Ce groupe de militants peu banal qui agit depuis 2012 dans plusieurs villes de Russie lutte contre les comportements de certains conducteurs. Il est vrai qu’à Moscou, l’automobiliste est roi et n’hésite pas à rouler sur les trottoirs, se garer sur la route et déranger autres usagers et passants.

Direction le quartier Loubianka, à deux pas du Bolchoï, le célèbre théâtre russe. Dans cette rue luxuriante où s’entassent Rolls-Royce et Bentley. Les trois hommes se dirigent vers la première voiture, un gros SUV de la marque BMW est stationné en double file et gène le flux de la circulation. Alors qu’Igor démarre sa caméra pour filmer la scène, Mohamed va à la rencontre des deux hommes assis au bord du véhicule. Ilia, de son côté, se tient à l’écart prêt à intervenir en cas de problème. Il s’agit du schéma classique et répétitif de chacune de leurs interventions.

 

Mohamed et Ilia demandent à l'automobiliste de déplacer son véhicule.

Mohamed et Ilia demandent à l’automobiliste de déplacer son véhicule.

 

Mohamed toque à la fenêtre. Derrière la vitre teintée qui descend se découvrent alors deux jeunes hommes à la mine peu commode. « Collectif Stop a Douchebag, vous gênez la circulation. Pouvez-vous déplacer votre véhicule s’il vous plait ? » demande, en russe, Mohamed aux deux hommes. Aussitôt la sollicitation effectuée, la vitre remonte et les deux hommes assis à bord du véhicule font mine d’ignorer leur interlocuteur. La réaction est immédiate. Sans attendre, ces justiciers de la route, aussi impertinents que courageux, dégainent leur rouleau d’autocollants géants pour en déposer un sur le pare-brise du véhicule. Immédiatement, les deux occupants, enragés par la situation, sortent de leur véhicule. La tension vient d’exploser en l’espace de 15 secondes. Au moment où le conducteur tente de retirer l’autocollant qui semble déjà faire union avec un pare-brise propre comme un sou neuf, l’autre attrape Mohamed et lui demande des explications de manière très agressive. C’est à la caméra qu’un des deux gaillards s’en prend ensuite en tentant de la briser.

 

Altercation entre Mohamed et le passager du véhicule

Altercation entre Mohamed et le passager du véhicule

 

Ce genre de petites caméras, le collectif n’en manque pas. Elles sont la cible privilégiée de leurs victimes. Celle-ci ne fonctionne plus, l’écran semble cassé. Pas de problème, Igor en détient une seconde dans son sac.

Pas de chance pour les membres de Stop a Douchebag, il semblerait, qu’aujourd’hui, ils s’en soient pris aux « mauvaises personnes ». Igor avoue craindre d’avoir affaire à la mafia arménienne. L’échange s’écoule lentement dans une atmosphère pesante. Environ dix minutes sont passées lorsqu’Igor, Mohamed et Ilia s’éloignent du véhicule qui ne bougera finalement pas de son emplacement. Mieux vaut ne plus s’attarder dans le quartier, nul besoin de se mettre en danger inutilement.

Justiciers youtubeurs

Comme la majorité des 150 membres qui composent le collectif, Igor, Ilia et Mohamed sont  de simples étudiants. Ce genre de situation d’extrême tension survient parfois, sans être quotidienne pour autant. La plupart du temps, les automobilistes acceptent de déplacer leur véhicule sans broncher. Les trois jeunes continuent  leur ronde vers une autre partie de la ville.

La prochaine victime est une magnifique BMW grise. Le conducteur est parti. Sans hésiter, Mohamed colle un sticker sur le pare-brise. L’aventure avec la première voiture semble pourtant avoir quelque peu secoué les trois hommes. Ils se dirigent lentement vers les bureaux du collectif. Sur le chemin, ils ne se privent cependant pas de rappeler les lois aux automobilistes en tort et de plaquer quelques autocollants ici et là.

Assez d’aventure pour aujourd’hui, il est désormais temps de réaliser le montage pour leur prochaine vidéo. Grâce à l’argent obtenu par leurs vidéos sur Youtube, ils peuvent s’équiper à souhait de stickers et caméras, tels l’épée et le bouclier de ces chevaliers blancs du bitume.

 

 

SEMAINE SPÉCIALE MOSCOU. Dans le cadre d’un échange à l’Université d’État Lomonosov de Moscou, 23 étudiants de l’IHECS ont intégré la faculté de journalisme pour une durée de deux semaines. Il s’agissait pour eux de suivre un programme international sur le journalisme et ses enjeux en Russie. Retrouvez l’ensemble des articles du projet “Ici Moscou” sur www.bxlbondyblog.be

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2 Responses to “Les justiciers du code de la route, caméra au poing”

  1. adeline.shanks@aol.com' GTDesign dit :

    très bon article je viens de trouver votre blog en flanant sur google , après l’avoir parcouru de long en large avec plaisir il faut bien avouer
    que les articles sont vraiment top. après l’avoir partagé sur twitter ils sont agréablement surpris
    à bientot au détour d’un nouvel article

  2. nishies@hotmail.fr' Michel dit :

    Merci de montrer un peu plus aux yeux du monde qu’il y a encore des gens qui prennent soin des autres même si c’est au péril de leurs santé.

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